Expérimentation subéricole

Bilan de l’essai de plantation de chêne-liège

  1. Rappel du contexte

Etude menée par l’association Forêt Modèle de Provence, initiée en 2013 pour se terminer en 2016, elle vise à faire le point sur la régénération du chêne-liège.

Elle se déroule en plusieurs étapes :

1/ Bilan des connaissances, à travers l’organisation de rencontres appelées « journées techniques du liège dans le Var » permettant de présenter le résultat du travail mené dans tous les pays subericoles, complété d’une étude bibliographique et locale sur l’ensemble des essais réalisés,

2/ Elaboration de préconisations techniques sur les modalités de régénération à préconiser(Stage de Master de J. Brun co-encadré par Forêt Modèle de Provence et l’ASL suberaie varoise),

3/ Réalisation d’une expérimentation de régénération en forêt privée varoise

2. Projet

Réalisation d’une coupe d’éclaircie et mise en place de deux modalités de régénération du chêne-liège :

  • régénération naturelle par glandée, qui sert également de témoin,
  • régénération artificielle par ensemencements de glands. 

Le site retenu pour cette expérimentation bénéficie de conditions stationnelles favorables : sol profond, parcelle située en bas de versant et exposée nord.

Il s’agit d’une parcelle de 2,25 ha appartenant au Groupement Forestier de la Fouquette, adhérent de l’ASL Suberaie Varoise et localisée sur la commune des Mayons.

Carte de l’emplacement des parcelles du projet
  • 3. Détail de l’intervention et des modalités de Régénération

→ Etape préalable sur la totalité de la zone du projet réalisée en avril 2015

Avant la période de fructification du chêne-liège qui a lieu de début septembre à fin octobre, il s’agit de réaliser:

– la coupe d’ensemencement qui a consisté à prélever sur ce site 27% du volume total du peuplement, afin d’obtenir une densité finale de 50 à 100 arbres par hectare en conservant les arbres avec un houppier développé en forme d’arbre fruitier, ayant des caractères phénotypiques satisfaisants (rectitude, cylindricité, branchaison, hauteur, qualité du liège) et sans problème sanitaire.

– la suppression du sous-étage et le broyage des rémanents.

Ces travaux ont été mécanisés et le bois de chêne-liège valorisé en paillage et sciage.

L’ensemble du site a également été protégé du sanglier par l’installation d’une clôture électrique, y compris pour la zone témoin

3.1 Régénération naturelle par glandée sur 0,60 ha

Cette zone sert de témoin. Les semis attendus de chêne-liège doivent se développer à partir de la glandée des arbres restant sur la parcelle qui jouent le rôle de semenciers.

Il est nécessaire de préciser que l’année 2015 n’a pas été une année favorable pour la glandée du chêne-liège sur cette propriété.

Pour évaluer correctement les résultats, il est important de distinguer l’apparition les jeunes chênes lièges issus d’un semis naturel d’un éventuel drageonnement que les travaux mécanisés d’éclaircie favorisent.

3.2 Régénération artificielle par ensemencements de glands sur 1,65 ha

Deux provenances différentes de glands ont été utilisées sur cet essai.

Une parcelle proche du même propriétaire est classée pour la récolte de glands mais l’absence de glandée a conduit à prélever des glands sur un autre secteur de la commune, à moins d’un kilomètre de distance. Ces glands ont été ensuite envoyés à la sècherie de la Joux pour ne garder que ceux dont la capacité germinative est bonne.

La deuxième provenance est portugaise, dans la région d’Alentejoet les glands proviennent d’un peuplement classé comme producteur de liège de qualité.

Travaux réalisés en décembre 2015 :

  • ripage du sol pour faciliter la mise en place des glands dans le sol,
  • marquage et ouverture des trous pour le semis avec un espacement de 4x4m,
  • semis de 3glands par trou à une profondeur de 6 cm. (2100 glands ont été plantés au total).

Quelques jours après la plantation, les glands ont subi une attaque très importante de rongeurs obligeant à rajouter une protection individuelle contre les rongeurs sur chaque trou de plantation.

4. Résultats

Le repérage des glands germés naturellement a été réalisé en mai 2016 pour évaluer le taux de réussite de cet essai.

A première vue, le drageonnement est efficace et les rejets sont généralement plus hauts et vigoureux que les semis de chêne-liège.

4.1. Sur le site témoin

Cinq placettes d’échantillonnage de 1 m2 chacune ont été établies pour mesurer la quantité de semis issu de la glandée naturelle des semenciers.

Aucun semis de chêne-liège n’a été identifié.

4.2 Sur la zone d’ensemencement

Comparaison entre le nombre de glands plantés et germés
Taux de réussite

Les taux de réussite sont très faibles, en particulier pour les glands varois : quasi nul ! et de 19 % pour les glands portugais, ce qui est encore peu satisfaisant.

Ce résultatpeut s’expliquer par l’attaque des rongeurs qui a suivi le semis, par la pénétration de quelques sangliers aux zones de faiblesse de la clôture électrique pourtant régulièrement contrôlée par le propriétaire et par les conditions de sècheresse connues dans l’hiver 2015-2016.

De plus, les glands varois semblent avoir vraiment manqué de vigueur pour germer. Des explications sont à rechercher du côté de plusieurs études menées par lesscientifiques dont Maria Carolina Varela au Portugal et Roselyne Lumaret en France.

Ils estiment que les suberaies varoises actuelles connaissent une certaine consanguinité car elles sont issues d’une population initiale réduite à un faible nombre d’individus.

De plus, les chênes lièges subiraient un vieillissement général de leurs cellules car ils sont très souvent issus de plusieurs générations d’arbres reproduits par drageonnement c’est à dire par clonage. Ils donneraient donc peu de glands et des glands peu productifs.

Distribution des glands germés
Dégâts de rongeur
Glands germés
Placette d’échantillonnage en zone témoin

5. Conclusion

Sur cet essai, le propriétaire prépare un regarnis pour décembre 2016 avec des jeunes plants de chêne-liège de provenance espagnolede la région de Girona. Il ramasse aussi des glands de chêne-liège sur place qu’il constate plus gros que ceux de l’année précédente et fera un petit essai de ré-ensemencement.

Enfin, il souhaite renforcer la clôture électrique par un fil supplémentaire et des piquets aux zones de faiblesse.

L’étude menée nous a permis de bien identifier les problématiques liées à la régénération du chêne-liège, notamment :

  • Le sanglier,
  • Les rongeurs,
  • Le changement climatique,
  • Le traitement en laboratoire et la qualité des glands.

Pour réussir un semis artificiel de chêne-liège, il faut protéger le semis dès la préparation de la parcelle contre le sanglier et les rongeurs, avec des clôtures électriques pour le sanglier et de protections individuelles pour les rongeurs. Un suivi de la clôture électrique est très important.

Le choix des glands est primordial. Nous avons constaté une énorme différence de taille et d’état de conservation entre les deux provenances. Les glands de Portugal étaient plus gros que les glands de France,ils avaient forcément plus de réserves en nutriments ce qui augmente leurs chances de germination et de développement.

En conclusion, les résultats de cette étude nous ont montré que la régénération du chêne-liège est difficile mais n’est pas impossible si on s’adapte aux conditions du territoire, notamment aux limitations climatiques et à l’énorme susceptibilité aux attaques d’animaux.

Il est également important de travailler au niveau de la récolte des glands, en ce qui concerne le choix du peuplement et la période de récolte, ainsi qu’au niveau des techniques de traitement et conservation en laboratoire.

Projet mené par Forêt Modèle de Provence et l’ASL Suberaie Varoise.



3 réponses à “Expérimentation subéricole”

  1. Baile Robert dit :

    Étude interessante mais resultats peu convainquants.
    Ce n’est pas avec ces résultats que l’on pourra relancer la suberaie varoise… Le changement climatique n’est il pas en partie responsable ???

    • Exactement, les résultats n’ont pas été à la hauteur des espérances, en raison notamment du manque de brassage génétique
      Au sujet du changement climatique, on va en parler lors des Journées Techniques du Liège à Ramatuelle (l’article est dans l’onglet « Nouvelles »), n’hésitez pas à vous inscrire (c’est gratuit). la conférence se déroulera le jeudi 3 octobre à Ramatuelle

  2. Testut Robert dit :

    Peut on avoir une idée du suivi 10 ans s’étant écoulés ?
    Quelques photos par exemple…

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